La grande falsification : l’art contemporain

Jean-Louis Harouel

Collection : Auteur : Pages: 180 ISBN: 9782865532599

Description

Le néant artistique abusivement appelé art contemporain est la lointaine suite de la crise de la peinture déclenchée par le progrès technique dans la seconde moitié du XIXe siècle. Sous l’effet de cette crise, la religion de l’art inventée par le romantisme s’est trouvée privée de sens. La délirante sacralisation de l’artiste par la philosophie allemande, qui lui conférait le statut de voyant, de messie, de philosophe, a basculé au XXe siècle dans l’absurde, le dérisoire, voire l’abject.

Tel est le prétendu art contemporain : une religion séculière de la falsification de l’art, où l’adoration de l’art a fait place à celle du soi-disant artiste, et où l’œuvre d’art se trouve remplacée par n’importe quoi pourvu qu’il ne s’agisse pas d’art. Aussi bien tout cela est-il aujourd’hui très vieux. Dès les débuts du XXe siècle, les figures les plus radicales des avant-gardes avaient été au bout de la logique du remplacement de l’art par n’importe quoi. Tout ce qui s’est fait depuis dans ce sens n’est qu’une fastidieuse rabâcherie.

Né de la volonté politique de la classe dirigeante américaine au temps de la guerre froide, le succès mondial du prétendu art contemporain est à beaucoup d’égards un accident de l’histoire. Il n’en reste pas moins que l’aberrant triomphe de cet ersatz d’art renvoie les sociétés occidentales actuelles à leur profonde déculturation.

Extrait

POSTFACE

Portée par un succès commercial sans précédent, l’imposture de l’« art contemporain » semble plus puissante que jamais. Son aberrant triomphe est très largement l’œuvre d’une classe mondiale de milliardaires, à laquelle la possession de ces inepties procure à la fois les jouissances du snobisme et les profits d’une spéculation effrénée, sans oublier la promotion des industries du luxe.

Pourtant, on voit des signes avant-coureurs d’un effondrement du système. En particulier, la doctrine officielle affirmant un progrès continu de l’art depuis l’impressionnisme jusqu’aux Koons et Hirst vient de subir un cinglant démenti. La réhabilitation éclatante du merveilleux peintre figuratif américain Edward Hopper a commencé d’ébranler la monopolisation séculaire du statut de grand artiste par le courant moderniste.

 

Un signe d’espoir pour l’art véritable : la revanche de Hopper

Exposée en 2012 au Grand Palais, l’œuvre de Hopper a suscité un enthousiasme général, s’accompagnant toutefois de l’oubli de la persécution dont ce grand peintre fut jadis victime de la part des peintres abstraits américains et surtout de Rothko. Celui-ci s’était montré particulièrement hargneux, vomissant dans la presse son mépris des tableaux représentant, comme ceux de Hopper, la vie américaine et prétendant que cette peinture était de la « foutaise ». Cependant, cette méchanceté eût été impuissante à anéantir Hopper et les autres grands peintres américains, sans l’intervention de la CIA et de la haute finance qui procura une prodigieuse célébrité aux Rothko et consorts et enterra vivants les peintres figuratifs.

La reconnaissance de Hopper est une belle revanche posthume. Pour être complète, elle devrait cependant s’accompagner de la remise à leur vraie place des expressionnistes abstraits. Les gigantesques toiles colorées des Pollock et des Rothko peuvent avoir un effet décoratif, mais, du point de vue de l’art de peindre, elles sont de la « foutaise ».

L’actuel triomphe de Hopper laisse présager une grande remise en ordre dans l’histoire de l’art du siècle dernier. Et les vrais artistes de notre temps, injustement ignorés des institutions, des médias et donc du public, doivent savoir que l’avenir – si bien qualifié par Tocqueville de juge éclairé et impartial – leur rendra nécessairement justice.

 

Le rire contre le canul’art

 

Même s’il est convenu de réserver le terme d’art contemporain aux cinquante dernières années et de parler d’art moderne pour la période antérieure, cette distinction ne doit pas masquer leur profonde unité de nature. Ce que l’on appelle improprement art contemporain constitue la forme extrême et tétanisée du mouvement moderniste né de la crise de la peinture européenne provoquée par l’invention de la photographie. Et, même si le phénomène s’est amplifié de manière exponentielle à partir des années 1950, cela fait un siècle  qu’une bonne partie de la production du courant moderniste ressemble fort à une mauvaise plaisanterie, à un canular. Voici plus de trente ans que j’appelle canul’art la gigantesque farce qu’est dans une large mesure la création prétendument artistique de notre temps[1].

Dès la fin du XIXe siècle, avec son intelligence acérée, le grand humoriste Alphonse Allais avait parfaitement compris que la folle course à la nouveauté du courant pictural moderniste conduisait fatalement au monochrome. D’où ses mises en garde, sur le mode de la plaisanterie loufoque. Décidant d’exposer des toiles recouvertes uniformément d’une seule et même couleur, il fut le véritable inventeur du monochrome ! Dès 1883, il présente une toile blanche sous le titre : Communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige. Cette farce est exposée rue Vivienne, chez Jules Lévy, dans le cadre d’une exposition des Arts incohérents. Allais récidivera en 1897 avec une toile rouge : Récolte de la tomate par des cardinaux apoplectiques au bord de la Mer Rouge[2].

Ces monochromes canularesques d’Alphonse Allais étaient la préfiguration de la toile blanche de Malevitch et des toiles monochromes d’Yves Klein. Simplement, pour Allais, adepte du castigat ridendo mores, c’était une bouffonnerie consciente destinée à mettre en évidence le désordre dans l’art provoqué par la radicalisation toujours plus grande du mouvement moderniste. Tandis qu’au contraire, pour Malevitch et Klein, c’est malheureusement sérieux ! La bouffonnerie se prend pour de l’art. On est en plein canul’art.

Contre celui-ci, l’arme du rire reste plus indispensable que jamais. Et l’une des plus belles réussites actuelles dans ce domaine est L’affaire Dussaert, une pièce de théâtre merveilleuse de drôlerie du dramaturge et comédien Jacques Mougenot, qui dissèque joyeusement la totale absence de l’art masquée par un discours abscons et pompeux[3].

La vérité du prétendu art contemporain : le NAC

Néant artistique contemporain, nullité artistique contemporaine, non-art contemporain : le sigle NAC exprime parfaitement la vacuité artistique du si mal nommé art contemporain.

Celui-ci est un système où les mots n’ont pas leur sens habituel. On ne peut pas l’appréhender en se servant des notions d’art, d’artiste et d’œuvre d’art. Les notions de beau, de laid, de savoir-faire et de talent artistique sont inopérantes. Malgré l’emploi du mot art, l’« art contemporain » n’a rien à voir avec l’art. C’est une imposture : c’est une absence d’art affublée du nom d’art.  C’est du non-art, du rien-en-art.

Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y ait rien à voir ! On peut voir, au contraire, parmi mille inepties, une cuvette d’urinoir, une roue de vélo sur un tabouret, un requin dans le formol, un homard géant. Simplement, il n’y a rigoureusement rien dans tout cela qui relève de l’art.

Le NAC a pour caractéristiques le remplacement de l’art par l’ « artiste » sacralisé et le remplacement de l’œuvre par n’importe quoi. Depuis la cuvette d’urinoir présentée en guise de sculpture par Duchamp, n’importe quoi peut servir d’œuvre. Ce canular anti-art a préparé le passage à un monde d’après l’art. Il n’y a pas d’œuvre, pas d’art. Il n’y a que de l’imposture et de la farce, de manière interchangeable.

Certes, chaque prétendu artiste a son petit domaine de prédilection. Mais tous ont en commun que ce qu’ils donnent à voir est sans rapport avec l’art. Ce sont des bouffons interchangeables, auteurs de bouffonneries interchangeables. Comme il faut bien qu’ils présentent quelque chose en guise d’œuvre, chacun d’entre eux suit la pente de son petit moi. Quand celui-ci est tourné, comme chez McCarthy, vers l’analité et la pornographie, cela donne un étron gonflable à la Monnaie et un sapin obscène sur la place Vendôme.

 

L’architecture contemporaine, cheval de Troie du NAC

L’idéologie qui impose l’abstraction géométrique comme horizon ultime de l’acte de bâtir fabrique, comme l’observe le professeur d’architecture André Scobeltzine, l’uniformisation du monde et amène la technique « à jouer un rôle esthétique qui n’est pas fait pour elle ». Si bien que « la sorte de beauté » émanant parfois de nos grands édifices de prestige possède « quelque chose de sidéral et de glacé ».

Les plus dangereux ennemis d’une esthétique civilisée sont aujourd’hui les Jean Nouvel et les Franck Gehry. Pire, ils sont le cheval de Troie de la vacuité artistique du prétendu art contemporain. Même ceux qui perçoivent son imposture n’ont pas le même rejet radical à l’égard des édifices qui s’en réclament, dès lors que ce sont des bâtiments véritables et souvent des prouesses techniques. L’abstraction architecturale, parce qu’elle ne relève pas de la même logique falsificatrice que le reste de l’« art contemporain », permet à celui-ci de dissimuler sa vacuité artistique et d’introduire sournoisement l’idée infondée de sa légitimité.

La reconstruction d’une esthétique civilisée passe par le retour de l’ornement et des arts décoratifs. Il faut conserver la rationalité moderne des bâtiments tout en leur permettant de s’ancrer « dans une histoire et un territoire ». Il est urgent de reconstruire un « art d’édifier » digne de ce nom, « qui nous aide à être au monde et à y faire société »[4].

Le NAC : une religion gnostique des faux artistes

L’évidence de l’imposture du prétendu art contemporain est occultée par une idéologie de nature religieuse qui sacralise les faux artistes. Cette religion a été dévoilée par l’un de ses grands pontifes : Jean de Loisy, alors inspecteur de la création au ministère français de la Culture et qui va devenir directeur du Musée d’art moderne. N’hésitant pas à assimiler la confiance qu’il faut avoir envers l’« art contemporain » à la « confiance » qu’un croyant doit avoir en le Christ, Jean de Loisy compare les productions des soi-disant artistes contemporains à des hosties. Et son argument est que dans les deux cas, il faut avoir la foi : foi en Jésus, foi en celui qui a le statut d’artiste. Sans la foi en la divinité du Christ, l’hostie est seulement « un peu de pain ». Sans la foi en la sacralité de l’« artiste », le carré blanc de Malevitch est seulement « un tableau blanc » ; l’urinoir présenté par Duchamp est seulement « un urinoir » ; le requin dans le formol que Damien Hirst prétend être une œuvre est seulement « une épave biologique ». Au contraire, la foi en celui qui est sacré grand artiste contemporain permet « la transsubstantiation » de la chose qu’il présente en guise d’œuvre et l’accès « à un monde nouveau »[5].

Cette religion à caractère gnostique sert de cache-misère à l’indigence de ce prétendu art qui n’en est pas un. Elle est là pour le protéger contre tous ceux qui dénoncent sa nullité, qui crient que le roi est nu ! C’est donc ce bouclier qu’il s’agit d’abattre.

Pour lutter efficacement contre l’imposture de l’« art contemporain », c’est cette religion délirante de l’« artiste » sacralisé qu’il faut attaquer, et non pas les absurdités pseudo-artistiques qu’elle prétend justifier. N’étant rien du point de vue de l’art, elles ne méritent même pas que l’on prête attention à elles !

[1] J.-L. Harouel, Essai sur l’inégalité, Paris, 1984, p. 146.

[2] A. Paucard, Manuel de résistance à l’art contemporain, Paris, 2009, p. 41.

[3] J. Mougenot, L’affaire Dussaert, Paris, 2011.

[4] A. Scobeltzine, « Pour un nouvel art d’édifier », Esprit, mars-avril 2012, p. 9-14.

[5] Conférence du carême de Notre Dame de 2008. Voir : B. Lejeune : « Image et vérité. Quel spirituel dans l’art ? », Catholica, n° 100, août 2008.

La Presse en Parle

Revue de presse du livre La Grande Falsification. L’art Contemporain par le journal Le Figaro, 9 mai 2009

Revue de presse du livre La Grande Falsification. L’art Contemporain par le journal Le Figaro, 10 février 2010

Revue de presse du livre La Grande Falsification. L’art Contemporain par le journal Hebdo Bourse Plus, 11 février 2011

Revue de presse

Bref, on l’aura compris, à tous ceux que l’art contemporain laisse de marbre, sans pouvoir mettre un nom sur ce rejet, la lecture du cinglant petit essai de Jean-Louis Harouel donnera une perspective historiques et de très clairs arguments.
Le Figaro, Jacques de Saint Victor

Jean-Louis Harouel décrypte avec une acuité saisissante, un réjouissant bonheur d’écriture, un phénomène qui révèle sans doute, en profondeur, une crise de civilisation.
Le Figaro – hors série, Michel de Jaeghere

Un essai aussi vigoureux qu’argumenté.
Valeurs actuelles, Laurent Dandrieu

De l’introduction à la conclusion, tout y est savoureux, mais surtout… édifiant !
La Gazette Drouot

L’immense mérite de cet ouvrage, à travers « l’art contemporain », est de nous monter qu’en réalité nous cheminons vers l’autodestruction.
Renaissance des hommes et des idées, Camille François Lestienne

La grande falsification se révèle être un indispensable instrument de combat des idées dont la lecture est d’une incontestable urgence.
Lecture et Tradition, Jean-Baptiste Geffroy