ABC de l’art dit contemporain

Nicole Esterolle

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Collection : Auteur : Pages: 240 ISBN: 9782865532902

Description

Cet ouvrage est un remède reconstituant, régénérant, reconstructif, pour panser les plaies encore vives résultant de quarante années de « déconstruction », de « burénisation », de « désartification » systématique de l’art et de persécution de la peinture, menées par un appareil d’État de type totalitaire et d’émanation bureaucratico-financière.

 Il apportera, je l’espère, informations et éléments de réflexion, de façon aussi ludique et roborative que possible, afin de nettoyer le paysage de l’art des monstrueuses enflures de l’art dit contemporain, lesquelles, en obstruant la vue, la pensée et la respiration des citoyens, empêchent la révélation de la création d’aujourd’hui, qui n’a jamais été aussi belle, abondante et diversifiée.

La preuve de l’existence et de la richesse de cette création est donnée à la fin de ce livre, avec une liste, non exhaustive, de 2500 artistes que j’ai « cueillis » en me promenant sur internet et que j’aime, parce que chacun d’eux est libre, inventif, courageux, généreux, déterminé, sincère, intègre, unique, surprenant et vraiment « contemporain ».

Je remercie mes amis Aude de Kerros, Christine Sourgins, Jean-Pierre Cramoisan, François Derivery et Christian Noorbergen pour leur aimable et complice contribution à la « définition » de quelques-uns des mots de cet abécédaire.

Nicole Esterolle

 

Informations complémentaires

Poids0.350 kg
Dimensions22 × 14 × 2 cm

Bankable

Bankable

Le produit « Art contemporain » bankable, est un effet de commerce réescomptable par un établissement financier auprès d’une banque centrale

Aude de Kerros

 

Les mots « Art » et « artiste »  évoquent aujourd’hui des contenus très divers et même parfois, absolument contradictoires.

L’image la plus visible de « l’artiste contemporain », celle qui occupe écrans et gros titres de la presse, est celle de l’artiste dit « bankable », une valeur financière sûre. Elle a remplacé l’image de l’artiste « d’avant-garde », engagé dans la déconstruction d’un monde mauvais et néanmoins adoubé par les institutions, plus anciennement celle de l’artiste « génie », incompris, romantique et moderne, et plus loin encore celle du Prix de Rome, élu à l’Académie.

Pour souligner l’origine de ce concept anglo-saxon, qui a vu le jour à New York, entre Wall Street et le MOMA, et nous l’écrirons avec un k.

Les conseillers financiers en patrimoine l’appellent « Blue chip », terme en vigueur à Wall Street évoquant les jetons bleus en usage au poker, trahissant l’atmosphère de jeu qui l’entoure. En peu de mots, c’est l’artiste dont les « pièces » se négocient au-dessus du million de dollars en salle des ventes.

Le terme « bankable » signifie que le produit « Art contemporain » est un effet de commerce réescomptable par un établissement financier auprès d’une banque centrale – c’est donc une valeur assurée, « sans risque ». Le seul nom de l’artiste devient un « titre » qui a, de ce fait, le pouvoir de produire un retour sur investissement. Il est disponible pour de multiples usages, à la fois financiers et monétaires. Il peut  servir de caution pour un prêt, engendrer du cash par-dessus les radars du fisc et des frontières, etc.

Les « conseillers en gestion du patrimoine » considèrent l’achat d’œuvres d’artistes « bankables » comme une niche fiscale incontournable, plus rentable quoique moins sûre que les investissements en titres forestiers et viticoles.

Il est probable que le concept de « niche fiscale » ait inspiré la création de « balloon dog » par l’ex-trader Jeff Koons, existant en sept exemplaires. En plastique et gonflé à l’hélium, elle exprime aussi la nature essentiellement éphémère, gazeuse et bullesque de ce produit financier dérivé, sécurisé.

La métaphore hautement financière de Balloon Dog a atteint 58, 4 millions de dollars en 2015, enchère la plus haute jamais obtenue pour un artiste vivant. Mais, un fait nouveau est troublant : depuis deux ans ce record historique n’a pas été battu… que présage-t-il ?

Le très haut marché des artistes « bankables » s’est figé en 2015. Serait-ce le bouquet final ? Rassurants, les « experts » parlent de « pose technique » pour qualifier des évènements similaires qui se produisent quand le marché boursier s’effondre. En 2002 et 2008 par exemple. Lors de ces évènements, le très haut marché de l’art s’est aussi figé, mais ne s’est pas effondré. Qu’en est-t-il aujourd’hui ? Même « sécurisé » par la chaîne de légitimation fabriquée en réseau, l’AC n’est que financier, il ne repose pas sur une valeur intrinsèque. Il durera le temps de vie du réseau et de ses stratégies.
Sérialité,   consortium, hyper visibilité, « win win »

Il n’y a pas d’art « bankable » sans production industrielle. L’artiste « bankable » est d’abord un chef d’entreprise capable de travailler à la commande, de fournir en temps et en quantité voulus une marchandise diverse, sérielle, comprenant de grandes œuvres spectaculaires pour les institutions, une gamme de pièces plus réduites à des prix correspondant à des clientèles moins fortunées et des produits dérivés, du T-shirt à la carte postale, destinés au tout venant. En effet « égalité et démocratie pour le consommateur » sont le code éthique de leur production. Les artistes bankables sont des bienfaiteurs de l’humanité, prêcheurs d’une nouvelle religion « l’identité vide et globale », vecteur d’amour, de paix et de prospérité. Ils en fabriquent les sacrements.

L’artiste « bankable » dirige designers, graphistes et artistes pour concevoir et exécuter ses produits, qu’il validera ou non. Ainsi s’est créée une prolétarisation inédite des créateurs au service des financiers.

 

Formation de la valeur en consortium

La construction de la valeur de l’art « bankable » se fait tout d’abord grâce à des collectionneurs qui s’entendent pour collectionner une marque d’art rentable. Les prix montent grâce à leur stratégie de réseau et ne baissent jamais puisque personne ne vend sans l’accord des autres, personne n’achète une œuvre appartenant au réseau sans avoir été adoubé par chacun des membres. Ainsi non seulement la valeur s’établit, mais aussi est sécurisée et devient un titre financier à usage entre soi.

Par ailleurs, les collectionneurs entretiennent toute une chaîne de production de la valeur : les institutions muséales, la commande publique, les universités. Ils ont pour fonction de légitimer l’art bankable. Ce sont des milieux délicats, qu’il faut savoir flatter et « traiter ». Les galeries internationales et salles des ventes sont quant à elles en charge de la cotation.

Tout cela fonctionne à la fois comme un trust et une entente, délits normalement punis par la loi, mais n’ayant pas prise sur ce titre si particulier de « l’art bankable », qui fait toute sa valeur.

 

L’hypervisibilité médiatique

Les médias font bien sûr partie intégrante de la chaîne de fabrication de la valeur, maîtres de la visibilité de masse, ils sont fort bien traités, ou sanctionnés, par les très grands collectionneurs qui ouvrent les portes de la scène sociale internationale.
Il est bien difficile cependant pour les médias de ne pas en parler. Ou de parler d’autre chose, Les stratégies de l’AC sont des pièges sophistiqués à médias. Par le biais des très grands formats réservés aux artistes assez « bankables » pour les produire. En effet comment la planète entière ne serait-elle pas informée de la présence d’un étron gigantesque, gonflé à l’Hélium, face à la plus belle vue de la baie de Hong Kong ? d’un Sex Toy colossal dressé place Vendôme à Paris ? D’une pince à linge monumentale sur la plus grande place de Philadelphie. Le XXL de l’art « bankable » est obligatoirement doublé d’une provocation, d’une déconstruction d’identité, d’une volonté de blasphème, pour créer l’évènement susceptible de créer des images hyper visibles et mémorisables… Elles ne peuvent provenir de l’admiration contemplative… Il faut du choc et de la polémique. Si « l’art bankable » était admirable, il ne pourrait pas circuler comme un titre. Aucun collectionneur ne voudrait s’en séparer et, chose funeste pour la finance,  il le thésauriserait ! L’artiste bankable est donc un fabricant d’objets n’ayant pas de valeur en dehors de la valeur fabriquée collectivement par le consortium. Les médias jouent un rôle majeur dans cette chaîne de valorisation. Elles rendent ce qu’elles montrent hyper réel et légitime parce que toute la vision a été collectivement partagée par des millions d’individus. C’est ainsi qu’il peut être repéré et répertorié au TOP 100, sorte de CAC 40 de l’art mondial.

Sur les marches de la visibilité de masse, il y a ceux qui postulent à l’élection par les réseaux. On les nomme « émergents ». Pour conditionner, ils se configurent rigoureusement à ce qui est attendu d’eux par les consortiums. Mais il y a peu d’élus. Fait notoire, parmi eux, aucun artiste « bankable » ne vit et travaille en France.

 

Les imbankables

L’imbankable absolu est sans conteste le « peintre », vivant et travaillant en France.

Mais qu’est-ce qu’un « peintre » pour un universitaire français éclairé ? Il vous répondra : un individu appartenant à une population résiduelle, mal étudiée, en voie d’extinction. Ces théoriciens s’étonnent de voir ces égarés travailler encore avec les mains, de faire des œuvres uniques, comme les sauvages d’ Aldous Huxley dans le « Meilleur des mondes », qui engendrent des bébés en faisant l’amour ! Pauvres peintres ! Ils font du beau pour la déco, des pastiches pour les nostalgiques !

Leurs théories et études sociologiques sur l’art fournissent aux « inspecteurs de la création » qui dirigent l’art en France, les données « scientifiques » permettant de présider au jugement de qui peut prétendre à la « contemporanéité » et donc aux subventions. Par ailleurs, ils se sont donnés comme mission d’aider à la fabrication de la légitimité internationale des artistes bankables dont aucun ne vit ni travaille en France. La sélection administrative depuis quatre décennies a ainsi créé un art officiel, reléguant tous les courants non conceptuels, en particulier la peinture, dans les fameuses poubelles de l’Histoire ! C’est ce que l’on appelle « l’exception française », objet de curiosité internationale!

Trente-sept ans de travail acharné de 200 « inspecteurs de la création » à plein temps n’ont pas engendré un seul artiste « vivant et travaillant en France », célèbres dans le monde entier… même les artistes officiels ne sont pas connus dans l’Hexagone, le grand public à peine à les citer. Ils connaissent généralement Buren et Boltanski, deux éternels avant-gardistes conceptuels des années 60, aujourd’hui octogénaires. Peut-être aussi – qui sait ?- Sophie Calle, une sexagénaire et un petit quinquagénaire, Fabrice Hybert. Même pas bankables !

DRAC

DRAC

À quoi s’y activent les « conseillers artistiques régionaux » ?

 

Dans chacune des DRAC (Directions Régionales des Affaires Culturelles), il y a un service Arts Plastiques avec deux ou trois préposés et leurs assistants. À ce niveau régional, ils sont dits « conseillers artistiques » et non « inspecteurs de la création artistique » comme on en trouve quelques-uns au ministère.

Au niveau régional, en effet, ils n’inspectent rien, ils ne voient rien, car on ne les rencontre jamais nulle part dans les vernissages d’expos ici ou là. Ils ne s’intéressent pas à ce qui se passe dans la région. Cela ne les concerne absolument pas.

Alors que font-ils ? Quelle est l’utilité de leur fonction ? Difficile de répondre à cette question, puisqu’aucune information sur le sujet ne semble accessible nulle part pour le citoyen moyen.

La rumeur dit qu’ils sont chargés de distribuer la subvention aux manifestations et aux artistes qui le méritent parce que respectant la norme et le langage de l’esthétique officielle conceptualo-posturale et sociétalo-questionnante. La rumeur dit que cet argent public ne sort donc pas d’un réseau de type sectaire de « méritants », au détriment de 95% des artistes et acteurs de l’art de la région, exclus du soutien public.

Hors de cette rumeur, on est dans l’opacité totale : rien sur le montant des sommes distribuées, rien sur les bénéficiaires, rien sur les instances d’évaluation, rien sur les critères d’expertise et d’attribution…

 

Rien ! Aucun compte à rendre à personne, circulez y a rien à voir, rien à savoir, rien à comprendre à ce qu’on tripatouille dans l’obscurité… On s’autocongratule, on s’autocondracule, on reste entre soi pour partager le gâteau, et si vous n’êtes pas contents c’est pareil, puisque vous n’êtes que d’affreux réacs incultes et nauséabonds.

 

Parfois cependant, les infos sont libérées du cercle des initiés, et l’on mesure alors qu’au-delà de la nullité, ou de l’inanité, c’est de la nocivité de l’action institutionnelle qu’il s’agit. Ainsi ces 450 000 € assumés par la DRAC Rhône-Alpes, dans les 750 000 € qu’a coûté l’informe fontaine -serpillière dégoulinante du financial artist international Rondinone récemment installée au parc de Miribel près de Lyon.

Alors oui, il faudrait bien sûr, reconcevoir un mode de fonctionnement utile des DRAC pour le développement de la création en régions et la reconnaissance de sa richesse et de sa diversité. Un autre fonctionnement que celui fondé sur le mélange des genres, la collusion, la corruption, le conflit d’intérêts et le détournement du service public.

 

Aillagonie

Aillagonie

Moralisation et aillagonisation de la vie publique

 

Je tombe de haut en apprenant que M. Aillagon, l’empereur du conflit d’intérêts, le prince de la collusion dispositif public-argent privé, l’un des plus influents parrains de cette mafia bureaucratico-financière qui contrôle les systèmes de reconnaissance et de valorisation de l’art en France, fait partie de l’« équipe » de M. Macron… Lequel dit haut et fort, dans le même temps, qu’il va moraliser la vie publique.

  1. Macron sait-il que son « conseiller » culturel a mis le Château de Versailles et le Centre Pompidou qui sont des biens publics, au service de M. Pinault pour la valorisation de ses produits artistico-financiers de type Koons, Murakami, Venet, etc. ? Sait-il que M. Aillagon se vante d’avoir pu, d’autorité, et sur un simple coup de fil, imposer la présence des sculptures en fil de fer d’Adel Abdessemed auprès du retable sacré d’Issenheim, à l’occasion du cinq-centenaire de celui-ci ? Et sait-il que ces tas de fil de fer barbelé appartiennent au même Pinault qui en voit ainsi augmenter la valeur marchande ?

 

Messieurs Macron et Bayrou, pourront-ils être informés sur cette situation pour le moins cocasse? Et, si oui, seront-ils en mesure de comprendre qu’il y a là problème et gigantesque incohérence dans leur politique de moralisation ?

D’autant que l’ « incohérence » est aussi du côté de M. Mélenchon dont la conseillère culturelle est une adepte déclarée du duchampisme financiaro-contemporain… Du côté aussi de M. Hamon dont la compagne travaille pour le luxe art contemporain Vuitton –Arnauld – LVMH… du côté de Mme Hidalgo qui applaudit aux tulipes de Koons et va mettre le superbe bâtiment de la Bourse du Commerce à disposition du même spéculateur Pinault pour la valorisation de ses titres artistico-boursiers, etc.

 

De quoi, quand on est artiste, être totalement démoralisé… De quoi, quand on est électeur, et qu’on exclut de voter FN ou Fillon, ne plus savoir à quel champion de la rigueur morale se vouer. ..

Alors que faire, que dire, que penser ? Je vous le demande : le débat est ouvert.

 

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