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Réflexions théoriques sur le problème des retraites

9 décembre 2019

Une fois de plus une partie importante de la population française est dans la rue, et encore une fois parce que le gouvernement Philippe, après ceux de Rocard ou de Juppé, entend « réformer » les retraites. Et tout le monde de me dire que décidément la France est irréformable, ce qui est une contre-vérité. Dans un monde qui a changé et qui continue de changer comme rarement dans l’histoire, la productivité du travail dans le secteur privé (c’est-à-dire la valeur ajoutée créée par chaque travailleur) est parmi les plus fortes au monde, si ce n’est la plus forte. La conclusion est simple donc : le secteur privé n’a cessé de se reformer, et cela malgré les lois plus débiles les unes que les autres qui cherchaient à l’en empêcher.

Et donc, d’où vient cette légende que la France serait incapable de se reformer ? Et ici la réponse est claire. Nous avons un État qui est à la fois obèse et mal géré et donc incapable d’avancer et de changer sans s’écrouler immédiatement sous son propre poids. Nous en avons un exemple parfait avec les retraites. Pour bien comprendre quel est le problème, il nous faut revenir à ce qu’est la retraite.

Revenons en arrière.

Depuis un peu plus d’un siècle, la durée de vie ne cesse de s’allonger et il est apparu normal qu’un nouveau Droit émerge, celui de pouvoir arrêter de travailler quand la force physique ne permet plus de le faire, et c’est très bien ainsi. Et là, il y a deux possibilités pour que le financement de ce droit soit assuré.

Le modèle « familial » dit de répartition : Ceux qui travaillent paient pour ceux qui ne travaillent plus.

Le modèle de l’épargne individuelle. Pendant toute ma vie, j’épargne pour pouvoir couler des jours heureux jusqu’à l’extinction des feux.

Pendant et après la Seconde Guerre mondiale, les gouvernements français ont choisi le modèle familial et pour une raison très simple. Ceux qui arrivaient à la retraite n’avaient eu aucune possibilité de se constituer la moindre épargne, celle-ci ayant été détruite par les deux guerres, l’inflation et la grande dépression. En 1945, le seul modèle opérationnel était donc la répartition, et elle fut choisie. C’est un bon système, pour peu que la démographie soit stable, or elle ne l’a pas été. Et c’est là le principal crime de tous nos gouvernements sans exception, depuis Giscard.

Alfred Sauvy ne cessait de dire qu’a partir de 2020, les choses deviendraient très difficiles et personne n’a bougé, tout le monde a menti, y compris le gouvernement actuel qui essaie de nous faire croire que tout pourrait s’arranger. La réalité est cependant que la retraite par répartition n’est plus viable et que les retraites vont voir leur pouvoir d’achat s’écrouler.

Pourquoi ?

D’abord pour des raisons démographiques. Tout le monde sait que de 1945 à 1962 nous avons eu un « baby- boom » et que ces classes d’âge furent particulièrement nombreuses. Tout le monde sait aussi qu’après 1962, la fertilité féminine baissa très fortement, ce qui au début ne posa pas trop de problèmes puisqu’il y avait un plus grand nombre de femmes en âge d’avoir des enfants, ce qui compensait le fait que chacune d’entre elles avait moins d’enfants, mais nous savons aussi que la fertilité a continué à baisser, ce qui fait qu’aujourd’hui nous avons moins de femmes en âge d’enfanter et que chacune d’entre elles a moins d’enfants que sa mère et beaucoup moins que sa grand-mère.

Ce qui fait que ceux qui travaillent vont devoir payer de plus en plus pour ceux qui ne travaillent plus, et cela n’est pas une hypothèse, mais une réalité.

Aucun problème dira le bobo au pouvoir, il n’y a qu’à importer plus de travailleurs des pays qui en ont trop et le problème sera réglé. C’est ce que vient de dire l’ignoramus en chef que notre Président a mis en charge de la réforme des retraites. Pourquoi est-ce idiot ? Parce que, comme je ne cesse de l’écrire, nous sommes en train de rentrer à toute vitesse dans la troisième révolution industrielle, celle de la connaissance, et donc notre économie a besoin de gens extraordinairement bien formés (voir mon livre écrit il y a plus de dix ans « C’est une révolte, non Sire, c’est une révolution »). Nous n’avons plus besoin de bras comme en 1890 ou en 1950, mais de cerveaux, et la plupart des immigrants ne savent ni lire ni écrire et ne parlent pas le français, ce qui on en conviendra constitue un vrai problème dans une société de la connaissance et veut dire que les nouveaux entrants, loin d’atténuer les problèmes créés par les transferts sociaux, vont les aggraver.

Venons-en à l’économie. Le principe de la retraite par répartition tel qu’il est appliqué en France implique que les retraités vont avoir un revenu soit constant soit en hausse en termes réels. Ils vivent donc dans un monde ou leur futur est CERTAIN. Or le futur est INCERTAIN. Le simple fait que le futur des retraites est incertain implique donc que le futur est encore plus incertain pour ceux qui travaillent encore.

Je m’explique.

Les retraites coûtent à peu près 14 % pour 100 de valeur ajoutée créée dans le pays. Si la valeur ajoutée créée l’année prochaine est de 102, il n’y aura aucun problème. Il n’y aura aucune difficulté à payer 14 aux retraites et le reste de la population pourra se répartir le reste soit 102-14=88 . Par contre si la valeur ajoutée tombe de 2 points l’année prochaine et qu’il faille payer 14, alors le reste de la population connaîtra une baisse de son niveau de vie, passant de 88 à 84, ce qui rendra la situation politique encore plus difficile.

Imaginons de plus que, de ce fait, les brillants sujets formés par les écoles et les universités françaises voient leurs charges fiscales et sociales augmenter très fortement pour pouvoir payer les retraites et de leurs parents et de ceux qui n’ont pas eu d’enfants, tout en payant les charges pour ceux qui ne savent pas lire.,En termes clairs, cela voudra dire un niveau de vie beaucoup plus bas que celui auquel les Français compétents pourraient avoir droit s’ils allaient exercer leurs talents en dehors de France, dans des pays ou existe des retraites par capitalisation (la Grande-Bretagne par exemple).

Et c’est ce qui se passe.

Quand je suis arrivé à Hong-kong en 2002, il y avait 5000 Français. Il y a en a maintenant 20000, c’est-à-dire plus que de Britanniques.  Et partout où je vais, je rencontre des Gaulois pleins d’ardeur au travail, en Grande-Bretagne, au Cambodge, au Vietnam, au Laos, en Amérique, au Canada, au Québec… Je ne doute pas qu’ils envoient des chèques à leurs parents (la France est avec les Philippines, le plus gros bénéficiaire de transferts familiaux venant de l’extérieur du pays), mais je les vois mal envoyer des chèques à ceux qui n’ont pas eu d’enfants et encore moins à ceux qui ne savent ni lire ni écrire.

Bref, la répartition c’est foutu, et pour deux raisons : la démographie ne la supporte plus et l’économie a été très mal gérée, le signe en étant que la part du secteur privé dans l’économie n’a cessé de baisser, et nous nous trouvons donc devant un cas d’école ou une promesse politique ne peut être tenue pour des raisons démographiques et économiques.

Venons-en à la capitalisation.

Dans ce système, chacun épargne pour son propre compte et celui qui épargne plus et qui gère mieux aura une retraite plus importante que celui qui n’épargne pas et/ou gère son argent comme un cochon, ce qui va apparaître comme extraordinairement injuste à toutes les cigales qui ne voient pas pourquoi les fourmis devraient passer un hiver tranquille alors qu’elles, elles crèvent de faim. Mais là, je fais immédiatement une remarque. Imaginons qu’une fourmi décide d’épargner comme seules les fourmis savent le faire et d’investir tout son argent en France. Eh bien, elle ne pourra pas avoir une rentabilité supérieure à la retraite par répartition, tout simplement parce que, sur le long terme, la seule chose qui compte c’est la démographie. S’il n’y a pas d’enfants pour payer ses retraites, il n’y aura pas plus d’enfants pour lui louer son appartement ou sa maison au bord de la mer et il n’y aura pas plus d’enfants pour rembourser l’obligation de l’État français qu’elle aurait soigneusement mis de côté dans son assurance vie.

Le VRAI, le SEUL avantage de la capitalisation est qu’elle vous permet d’investir dans une structure démographique différente de celle de votre pays.

Et la seule solution pour le lecteur de l’IDL qui en aurait les moyens est donc de déployer son épargne a 100 % en dehors de la France puisqu’il y a une chose dont je suis à peu près certain, c’est qu’un enfant qui n’est pas né aujourd’hui ne sera pas là dans vingt ou quarante ans. Il faut donc investir là où des enfants naissent, où un état de droit existe et où la retraite par capitalisation existe déjà.

Mais cette solution est bien entendu interdite par le législateur, qui dans sa grande sagesse a fait passer toute une série de lois et de règlements pour vous forcer à continuer à investir en France, que vous le vouliez ou non. Imaginez que vous soyez un docteur ou un avocat qui cotise à une retraite gérée par sa profession. Les placements de ces caisses, qui n’ont rien à voir avec l’État, sont cependant tous strictement encadrés. Par exemple beaucoup de ces organismes doivent avoir 50 % en obligations françaises ou de la zone Euro dans leurs livres, or, au jour d’aujourd’hui, ce sont les pires des placements : acheter une reconnaissance de dettes à quelqu’un qui va faire faillite est rarement rentable. Et portant l’État vous y force. ,Qui plus est, je suis à peu près certain qui si les choses tournent mal pour le régime général, ces caisses seront nationalisées au nom de la Justice fiscale, car voler leur épargne aux fourmis est la seule façon de maintenir en vie pendant quelque temps encore un système de répartition dont je rappelle qu’il ne peut plus fonctionner.

Nous sommes donc dans une situation très difficile

Réfléchissons ensemble en prenant quelques exemples.

Le gouvernement vénézuélien a garanti des retraites confortables à tous les citoyens, mais comme le pays est en faillite, rien n’est payé ou plutôt tout est payé dans une monnaie qui ne vaut plus rien. La première constatation est donc que la garantie du gouvernement ne vaut rien et que la seule nécessité est que le pays où je mets mon épargne soit bien géré. Ce qui exclut la France.

Après avoir désindexé les retraites en septembre 2019, le gouvernement français a fait pression sur la BCE pour que les taux d’intérêts soient négatifs, ce qui veut dire que le gouvernement refuse de payer pour avoir accès à l’épargne des retraités, ce qui n’est rien d’autre qu’un impôt sur les épargnants, les appauvrissant encore un peu plus. Comme l’a dit madame Lagarde, entre rémunérer l’épargne et créer des emplois, je choisis les emplois, ce qui prouve deux choses : que madame Lagarde ne comprend rien à l’économie et qu’elle se contrefout des retraités. Entre les retraités français et l’Euro qui nous tue, monsieur Macron et toute la technocratie mondialiste ont choisi l’Euro. Dont acte, mais tout retraité et tout épargnant français qui dans ces conditions garde des obligations françaises ou soutient monsieur Macron ou sa majorité n’aura que ce qu’il mérite : il vieillira dans un dénuement de plus en plus extrême.

Les deux paragraphes précédents mettent en lumière que la retraite que vous a garantie le gouvernement ne suffira pas à maintenir votre niveau de vie et cela est CERTAIN.

Que faire

Si vous aimez votre métier et que cela soit possible, prenez votre retraite le plus tard possible, pour rester maître de votre vie, ou mieux encore, ne la prenez jamais.

Faites un bilan de vos actifs et réorganisez-les du mieux possible. Pour celui qui aurait des biens fonciers de grande valeur et une retraite, il serait bien d’alléger sur le foncier pour se constituer une retraite bien à lui en investissant hors de France les sommes ainsi libérées dans des pays ayant une bonne démographie, dans la mesure ou l’immobilier français est très cher par rapport aux actions dans toute une série de pays sérieux. Une autre bonne façon de le faire est d’investir dans des sociétés françaises n’ayant rien à voir avec l’État et qui seraient déjà présentes dans ces pays (voir la liste dans l’un de mes derniers articles, celui sur « la Bourse, ce n’est pas pour moi… »). Et encore une fois : vendre toutes les obligations françaises, surtout si elles sont dans une assurance-vie

Pour les jeunes qui ne sont pas encore à la retraite, envisager d’aller passer quelques années en dehors de France pour se constituer un capital financier sans être massacré par les impôts me semble judicieux. En tout cas, c’est ce que j’ai fait.

En conclusion, et comme toujours, vous devez réfléchir à long terme et vous occuper de vous-même. Essayez de mener cette réflexion en famille si vous le pouvez, car la famille reste le cœur de toute solidarité.

Personne d’autre ne le fera à votre place et surtout pas les hommes politiques.

Après tout, et comme le disait Chirac, « les promesses des hommes politiques n’engagent que ceux qui les croient. »