Publié le

Marre d’être pessimiste

20 janvier 2020 

Charles Gave

Il y a bien longtemps, quelque temps après la chute du mur de Berlin, j’avais lu un article écrit par un sociologue américain expliquant que, dans le fond le boulot de la presse, était de nous fournir chaque jour notre ration de mauvaises nouvelles pour que nous restions bien obéissants, ce dont j’étais déjà intimement persuadé. Mais la nouveauté était que ce cher homme expliquait que maintenant que le danger de guerre nucléaire entre l’Union soviétique et les États-Unis avait disparu, il allait falloir trouver autre chose pour éviter que la classe « soumise » (vous et moi) n’ait la mauvaise idée de demander des comptes à la classe dirigeante (eux…). Et notre sociologue avançait l’idée qu’« ils » allaient sans aucun doute se trouver de nouveaux ennemis (ce qui fut fait avec l’émergence de la Russie, de la Chine, de l’Irak, de l’Iran, etc..), mais que surtout, « ils » allaient essayer de recréer de vieilles peurs millénaristes du style (et c’est moi qui parle ici) « on va tous mourir dans des souffrances atroces, le réchauffement atmosphérique va détruire la déesse mère, Gaia, il est à peu près certain que le futur de nos enfants va être bien pire que ce que nous avons connu et d’ailleurs faire des enfants est criminel ».

Et bien entendu, tout s’est passé comme prévu par le sociologue et si par hasard j’écoute France Inter(minable) le matin, j’hésite en sortant de chez moi entre aller au bureau pour travailler et aller me jeter dans la Seine pour m’éviter des souffrances futures qui s’annoncent abominables.

J’hésite, mais pas trop longtemps. J’ai donc décidé dans le papier de cette semaine d’évoquer un certain nombre de choses qui vont plutôt en s’améliorant, pour essayer de remonter le moral aux lecteurs de l’IDL, une tache qui ne devrait pas être trop difficile faute de quoi ils ne me liraient pas.

Commençons par une petite nouvelle qui a fait ma joie et dont je pense qu’elle a dû échapper à tous les lecteurs de l’IDL. Al Gore, quand il était Vice-Président aux USA il y a vingt ans, avait fait disposer dans les parcs nationaux des Rocheuses de grandes pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « Quand vous viendrez ici en 2020, les glaciers que vous voyez devant vous auront disparu ». Pour ce courage et cette prescience extraordinaires, Al Gore a reçu le prix Nobel de la Paix. L’ennui est que les glaciers sont toujours là, et bien là. Et du coup, l’administration des parcs aux USA a décidé de retirer toutes les pancartes, ce qui est hilarant. Ils auraient pu faire des économies et juste remplacer 2020 par 2040 et le tour aurait été joué, mais Gore n’est plus au pouvoir…

Voilà qui me rappelle les prédictions du Club de Rome dans les années 70. Le monde consommait à l’époque 50 millions de barils de pétrole par jour et les prédictions de cette auguste institution annonçaient qu’il n’y en avait plus que pour dix ans. Cinquante ans plus tard, nous consommons 100 millions de barils par jour et les réserves sont équivalentes à vingt ans de consommation. Et je passe sur l’inévitable famine en Inde qui devait entraîner plus de 400 millions de morts puisque l’Inde est devenue depuis exportatrice nette de produits alimentaires alors même que sa population a plus que doublé …

Il en est de même pour le réchauffement atmosphérique. La certitude que nous allons griller à cause d’un réchauffement de la planète que nous aurions causé semble devoir se produire toujours dans vingt ans, ce qui me permet de dire que la petite Greta a de beaux jours devant elle et qu’elle sera encore en vedette à Davos (là où les hommes du passé rencontrent les Oints du Seigneur qui ont envie d’être achetés) … en 2080 puisque le monde sera à la veille de s’écrouler en 2100.

Continuons par la vieille complainte malthusienne, « il n’y en aura pas assez pour tout le monde » et il faut donc organiser la décroissance économique de toute urgence. Je vais reprendre ici les conclusions de Matt Ridley, chroniqueur au Spectator, l’hebdomadaire conservateur britannique, et auteur du « best-seller » mondial, « l’optimiste rationnel (à lire absolument) » dans l’une de ces dernières chroniques pour ce journal. Dans cet article, Ridley reprend une étude faite par un autre anglais, Chris Goodall, investisseur dans les nouvelles technologies dont le but était de calculer le POIDS du PIB. Les conclusions en sont très surprenantes.

Les voici. Si l’on sépare le PIB britannique en deux masses, ce qui pèse lourd (acier, charbon, pétrole, biens industriels, avions, automobiles, etc..), et ce qui ne pèse rien du tout (du style de cet article que vous lisez sur votre ordinateur), de 2000 à 2017, la consommation de produits pondéreux par personne et par an a diminué passant de 12. 5 tonnes à 8. 5 tonnes, soit une baisse d’environ un tiers.  Pendant ce temps-là le PIB en volume progressait de 22 % par habitant, alors même que nous avons eu deux grandes crises financières, de 2000 à 2003 et de 2007 à 2009…

D’autres travaux similaires ont montré que le poids en tonnes du PIB britannique a diminué de 90 % depuis 1945. Nos PIB deviennent de plus en plus légers…

On ne va pas manquer de cuivre d’aluminium, d’acier, de ciment, bien au contraire. Et on ne va pas mourir de faim non plus., car la productivité agricole fait partout des bonds gigantesques.  Le professeur Jesse Ausubel, de l’Université de Rochester aux USA, fait remarquer qu’alors que la production agricole dans le monde a triplé depuis 1950, la consommation d’eau est restée stagnante depuis cette date tant la technologie de l’irrigation a évolué.

Parallèlement, l’utilisation des engrais a atteint son plus haut il y a 10 ans et depuis ne cesse de baisser. Et du coup, on met d’immenses territoires en friche. Et fort normalement, la forêt se développe à toute allure partout dans le monde et il y a plus de bois et de forêts dans le monde aujourd’hui qu’il y a trois siècles. Et cela est vrai du monde entier.

Si les progrès de productivité agricole continuent à leur rythme historique, dans les cinquante ans qui viennent, le monde va libérer un espace agricole égal à la surface de l’Inde. C’est donc dire une fois encore que nous ne sommes pas près de mourir de faim et de froid, ou de manquer d’espace pour bâtir des villes ou des villages et qu’être malthusien depuis 1830 a toujours été une erreur et le restera.  Le seul homme qui ait été en trop sur la terre depuis deux siècles a en fait été Malthus.

Des problèmes importants de pollution existent cependant et ils touchent principalement des zones qui n’appartiennent à personne, tels les mers, les rivières ou les océans. Voilà un chantier auquel chaque État pourrait s’attaquer, en recherchant le pollueur initial et en le faisant payer. Il n’en reste pas moins que dans mon enfance à Amiens, où tout fonctionnait au charbon, la pollution était gigantesque, comme elle l’était à Londres ou à Cleveland où les rivières dans lesquelles on pêche aujourd’hui prenaient feu. Depuis que le charbon a été interdit pour le chauffage individuel dans les années cinquante en Grande-Bretagne, le fameux brouillard londonien qui tuait des milliers de personnes chaque année a complètement disparu et n’existe plus que dans les bandes dessinées de Blake et Mortimer.

Dans le domaine médical, le mélanome qui tuait il y a 10 ans quasiment 95 % de ceux qui en étaient affectés est maintenant traité dans plus de 60 % des cas, le cancer du poumon est en chute libre aux USA, des maladies comme la sclérose en plaques commencent à bénéficier de traitements efficaces… Le déchiffrage du génome humain va permettre de fabriquer des médicaments littéralement à la carte et nous allons donc passer au traitement au niveau de la cellule malade directement. On commence aussi à comprendre comment le cerveau fonctionne, ce qui devrait amener  à de prodigieuses avancées dans le domaine des maladies mentales, de la dépression à la maladie d’Alzheimer en passant par le Parkinson.

Dans le domaine de l’information, tout le monde a accès à la même information en même temps, ce qui va permettre une explosion de la connaissance qui ne restera plus sous le contrôle jaloux des sachants, ce qui veut dire à terme la mort des Universités et la réintroduction de la concurrence dans nos systèmes éducatifs, ce qui sera une bonne, une très bonne chose.

Dans l’ensemble, il n’y a donc pas de raison d’aller se foutre à l’eau.

Si l’on regarde une photo instantanée du monde actuel, on est autorisée à dire que tout va mal. Mais si l’on regarde le film des cinquante dernières années, le scénario est complètement différent. Certes bien des choses vont encore mal, mais bien d’autres s’améliorent à toute vitesse, telles l’espérance de vie ou la vieillesse en bonne santé… Et bien sûr, les journalistes et les marxistes culturels ne vous parlent que la photo instantanée et jamais du film.

Ce qui m’amène en conclusion à ce qui s’est détérioré depuis ma jeunesse et ici la réponse est simple. Le lien de confiance qui unissait les gouvernants et les gouvernés s’est complètement effondré et nos sociétés souffrent d’un grave dysfonctionnement politique. Et donc, si nous devons avoir une crise grave, cette crise sera de nature politique et non pas économique. 

Comme je l’ai souvent écrit, la démocratie représentative est apparue avec la révolution industrielle avec laquelle elle était comme l’envers et l’endroit d’une même pièce de monnaie. Hélas, cette forme de démocratie semble être incompatible avec une société de la connaissance. Il nous faut donc passer à la démocratie directe avec le referendum d’initiative populaire ou RIP. C’est, je crois, la seule façon de se débarrasser des politiciens professionnels qui gouvernent en s’appuyant sur la dictature des minorités soutenues par les médias officiels.

La révolution du Brexit est arrivée en Grande-Bretagne grâce à un referendum « octroyé, à contrecœur » au peuple par le Parti conservateur qui était en train d’être détruit par Nigel Farage et Il a fallu quand même trois ans pour que la voix du Souverain soit enfin entendue.

Inutile de souligner en conclusion que l’Europe que l’on nous propose comme projet n’a qu’un objectif : éloigner le pouvoir du Peuple pour le confier à des gens non élus. C’eut été une bonne idée (peut-être) en 1920 et encore… En 2020 c’est tout simplement une billevesée anachronique.

Ce qui m’amène à mon habituelle conclusion financière.

Les solutions à nos problèmes viendront comme toujours de la liberté laissée à chaque individu et donc de l’ingéniosité humaine, jamais des gouvernements et des États. Vos investissements doivent donc être effectués dans le système capitaliste et non pas dans le système marxiste et bien sûr dans les pays qui favorisent le premier et essaient de démanteler le deuxième.

Rien de nouveau donc depuis la fin du XVIIe siècle. Si vous vous sentez une âme de révolutionnaire, devenez chef d’entreprise.