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Union européenne 2024 : retour de l’AMGOT ? par Jean Goychman 

parJean Goychman

En 1944, après le débarquement en Normandie, de Gaulle avait réussi à prendre de vitesse les armées « alliées » avant que le dollar AMGOT imprimé par les États-Unis ne soit mis en circulation dans notre pays, et ce, sous contrôle militaire. Les initiales AMGOT signifient : Allied Military Government for Occupied Territories. Ce régime de gouvernement militaire devait s’appliquer à tous les pays « libérés » à commencer par la France.Établi pour une durée relativement courte (environ un an), ce régime transitoire devait permettre de mettre en place un gouvernement conforme aux visées américaines dans chacun de ces pays. On peut, en passant, remarquer que la France était, à ce moment, rangée du côté des vaincus plutôt que celui des vainqueurs.

De Gaulle a transcrit dans ses « mémoires de guerre » cette phrase prononcée lors de son discours du Palais de Chaillot à Paris le 12 septembre 1944 :

« Nous croyons que décider sans la France de quoi que ce soit sur l’Europe serait une grave erreur… »

Il y a un peu plus d’un an, j’écrivais dans un article consacré à l’intégration européenne :

« Le grand obstacle à la mondialisation monopolaire a toujours été la souveraineté des nations. Au-delà de l’évidence antinomique, qui ne devait jamais apparaître, faute de disqualifier le processus avant même que sa mise en œuvre ne débute, le contournement de cette souveraineté ne pouvait se faire qu’en remplaçant les nations par une autre entité. Pour réussir une telle mystification, cette entité devait apparaître comme un substitut amélioré de la nation, présentant les mêmes avantages tout en étant mieux adaptée aux changements que l’inéluctable évolution des choses allait entraîner.

C’était, en quelque sorte, une modification fondamentale qui devait rester souterraine, du moins tant que les choses ne devenaient pas irréversibles. »

« Au lendemain de la guerre, tous les peuples aspiraient à la paix. Il y a fort à parier qu’ils y ont toujours aspiré et je n’ai pas trouvé d’exemple de guerre déclarée à un peuple par un autre peuple.

Depuis 150 ans,  la France n’a jamais déclaré directement la guerre à un autre pays. Nous nous sommes toujours trouvés en état de guerre par le jeu des “alliances”.  Mais lorsque les malheurs de la guerre sont encore présents dans les esprits, l’opinion publique est plus réceptive aux discours pacificateurs. Faire de la nation la cause universelle des guerres en la désignant comme résultat du nationalisme s’imposait à ceux qui voulait détruire les nations, et ce fût efficace. Evidemment, s’il n’y avait plus de guerre en vue et que les causes de celle-ci avaient disparu, pourquoi entretenir une armée nationale?C’est ainsi que le piège tendu par l’AMGOT s’est refermé sur l’Europe de l’Ouest ». 

Le but caché de l’AMGOT

80 ans plus tard, où en sommes-nous ?

Le conflit ukrainien a clairement montré que les pays de l’Union Européenne s’étant entièrement reposés (à l’exception notable de la France jusqu’en 2007) n’avaient plus les moyens matériels de conduire une guerre de « haute intensité » au-delà d’une période de quelques jours, sans parler des effectifs combattants.

Forts de cette analyse, les partisans d’une Europe fédérale poussent leurs pions afin d’accélérer le processus de « supranationalisation » qui conduirait à un Etat européen fédéral, dans lequel les nations se fondraient. Opportunisme ou plan concerté ? la question mérite d’être posée.

Toujours est-il que cette voie proposée correspond, comme par hasard, aux visées de l’État profond américain concernant le futur de l’Union européenne et la façon de le faire évoluer vers une une structure qui faciliterait son contrôle.

De plus, une guerre, ou pour le moins un climat hostile permanent analogue à une nouvelle « guerre froide » entre la Russie et une Union européenne fédéralisée avec un gouvernement supranational permettrait de garantir dans le temps que certains des États fédérés n’iront pas faire « cavalier seul » pour reprendre des relations économiques (et plus si affinités) avec la Russie. L’obsession de ce rapprochement ayant toujours été la hantise de l’État profond, on comprend tout l’intérêt que  présente pour lui la mise en œuvre d’un tel éxécutif qui n’aurait plus à se préoccuper des velléités des souverainetés nationales qui disparaîtront avec les nations.

Imposer les choses par la peur

Quand on pense ne pas être assez puissant seul pour affronter un adversaire, le réflexe est de se regrouper pour y faire face. Cependant, il faut que cette peur soit la conséquence d’un danger réel et non d’un discours repris en boucle par les médias pour qu’il devienne l’expression d’une réalité. L’effet sidérant, voire paralysant, de la peur ne doit pas empêcher de mesurer les conséquences de ce qui est décidé sous son emprise. Malheureusement, depuis des décennies, c’est cette ambiance de peur permanente dans laquelle nous vivons qui permet de nous imposer des choses auxquelles nous n’aurions pas consenti sans elle.

Depuis 1648 et les traités de Westphalie, les nations européennes sont au coeur de la géopolitique du continent et elles ne doivent pas disparaître. Ce sont les nations qui se sont organisées après la fin de la seconde guerre mondiale sur un plan mondial et tout s’est articulé autour d’elles.

On nous parle beaucoup de démocratie et tout le monde semble y être attaché. Elle n’est possible qu’au travers des peuples qui ont su constituer ces nations. Or, une nation ne peut exister sans un peuple et ne peut résulter d’une fusion entre nations existantes. Seuls les États peuvent se fédérer, mais pas les peuples.

Comme il n’existe pas de peuple européen, il ne peut y avoir de nation européenne, donc pas de souveraineté européenne non plus, quoi qu’en dise Emmanuel Macron.

Dans ces conditions, comment installer une démocratie à un niveau fédéral européen ?

C’est probablement la raison pour laquelle la modification des traités européens prévoit que la Commission européenne va devenir l’exécutif européen. Les commissaires étant nommés et non élus, cela va beaucoup simplifier les choses, mais au détriment de la démocratie.

Nous ne devons pas nous laisser imposer la disparition de notre nation et il faut trouver le moyen de le faire savoir le 9 juin.