par Edouard Husson 27 juin 2025 Le Courrier des stratèges Du point de vue des intérêts français, le sommet de l’OTAN à La Haye est un désastre. Tout d’abord, il faut comprendre que des structures du type de l’OTAN et de l’Union Européenne ne peuvent que provoquer la capitulation des dirigeants français qui les fréquentent. Ensuite, notons que, quelles que soient les rodomontades des uns et des autres, l’Union Européenne finit toujours par se soumettre au président américain en place. De ces constats, il est possible de tirer des enseignements pour la France, afin de lui permettre de retrouver indépendance, capacité à défendre ses intérêts et influence sur les affaires du monde. Je reviens sur le sommet de La Haye. Je faisais remarquer hier que le mot Europe n’apparaît pas dans le communiqué final. L’Elysée a glissé que seule la France avait essayé d’imposer le mot….Il aurait mieux valu ne rien raconter, tant cela souligne l’impuissance de nos actuels dirigeants – en fait des dirigés. Tirons les conclusions…
Curnonsky, « le prince des gastronomes »
C’est toujours une joie, pour un amoureux des lettres, de partager ses passions avec le plus grand nombre — et plus encore, dans les colonnes de La Nef, de faire découvrir à mes lecteurs quelques figures inédites aux parcours singuliers. Parmi ces figures de la République des lettres, Curnonsky reste une énigme savoureuse : à la fois chroniqueur, critique gastronomique, conteur à l’ancienne et roi sans sceptre d’une France rêvée. On l’a surnommé « le prince des gastronomes », mais il fut aussi un maître du style, un styliste de la bonne chère, et un écrivain sans œuvre — ou plutôt, avec une œuvre dissoute dans mille journaux, menus, réclames, épîtres comiques ou guides de voyage culinaires. Maurice Edmond Sailland, (1872 –1956) alias Curnonsky est né à Angers. Provincial, il en a gardé le goût pour la cuisine des régions. Il choisit son nom de plume d’après une tournure latine facétieuse — cur non sky ? « Pourquoi pas moi ? » — à une époque où russifier…
Bouhours, l’inconnu du Grand Siècle
Le RP Dominique Bouhours (1628-1702) est un prêtre jésuite, grammairien, biographe et apologiste français. Se voulant continuateur de Vaugelas, il a exercé une influence non négligeable sur des auteurs tels que Boileau, La Bruyère et Racine, qui lui envoyait ses pièces à corriger. À une époque où le style est devenu une signature personnelle, revenir à Dominique Bouhours (1628-1702) a quelque chose d’étrangement salutaire. Jésuite, homme de lettres, critique, moraliste, Bouhours incarne cette figure du XVIIe siècle français qui tente d’unir rigueur de pensée, élégance d’expression et exigence morale. Il fait figure tantôt d’éminence grise tantôt de conseiller. Parrain des lettres, il semble s’effacer et laisser les géants du siècle trôner de bon droit sur scène ou en chaire, qu’ils s’appellent Racine ou Bossuet, mais tient de manière remarquable le rôle de directeur de conscience littéraire auprès de Boileau, La Bruyère qui viennent le voir, demander telles ou telles améliorations ou changements, demander, en somme, autorisation. Et souvent, le vieux prêtre renvoie ces purs stylistes à leur besogne.…
Le jardin européen au bord de la ruine
par Lucas Leiroz En persistant dans la guerre, les dirigeants européens condamnent non seulement l’Ukraine à la désintégration, mais accélèrent également le déclin structurel du continent lui-même. La guerre en Ukraine entre dans une phase critique, non seulement pour Kiev, mais aussi pour une Europe qui, aveuglée par des slogans creux et des promesses irréalistes, se trouve au bord du précipice géopolitique. Ignorant les signes évidents de l’épuisement militaire et sociétal de l’Ukraine, les dirigeants européens persistent dans une escalade suicidaire de la militarisation qui, loin d’empêcher l’effondrement de l’Ukraine, entraîne le continent dans une spirale de déclin économique, politique et stratégique. L’impasse s’est aggravée lorsque les États-Unis ont commencé à montrer des signes de fatigue et une volonté de mettre fin au conflit. Washington pousse désormais à une solution négociée, tandis que Bruxelles insiste pour maintenir Zelensky à flot, offrant non pas de vraies solutions, mais de faux espoirs sous la forme de cessez-le-feu temporaires et de nouvelles livraisons d’armes. L’objectif est évident : gagner du temps…
La grande muette étouffée : le ministère des armées en faillite…
Cyril de Lattre mardi 17 juin 2025 Dans le théâtre d’ombres où se joue la puissance hexagonale, un acte tragico-burlesque se déroule en coulisses, loin des fanfares présidentielles annonçant une ère nouvelle. La défense française, ce colosse aux pieds d’argile financiers, titube sous le poids d’une réalité implacable : elle mène sa guerre à crédit, sur la foi de promesses aussi creuses que les caisses de l’État. Le constat, rapporté sans fard par BFMTV ce 6 juin, jour anniversaire d’un débarquement qui exigea jadis des moyens tangibles, est un camouflet cinglant pour ceux qui brandissent l’étendard du réarmement sans en posséder le premier sou. Oui, le ministère des Armées, ce fer de lance supposé du « redressement stratégique » dans un monde en convulsions, frôle bel et bien la cessation de paiement, englué dans une dette abyssale de 8 milliards d’euros pour de simples équipements militaires – somme astronomique qu’il lui faudra pourtant éponger d’ici la fin 2025. Une entreprise privée affichant un tel passif d’impayés se verrait…
Comment la CGT est devenue l’antichambre du macronisme…
par Éric Verhaeghe le Courrier des stratèges 18 juin 2025 Bien sûr, et officiellement, la CGT est un syndicat contestataire, plus ou moins anti-capitaliste (plus personne ne sait exactement ce que cela signifie), allergique à plein de choses que les macronistes adorent, etc. Et puis il y a la réalité profonde : celle qui dépasse la comédie du pouvoir et qui touche aux racines de la caste et de son système de domination. Il est important ici d’en montrer les connexions, et même les connivences, pour illustrer ce que nous pourrions appeler la soviétisation rampante du capitalisme français dans l’intérêt bien compris de quelques hiérarques cégétistes… et de nombreux hiérarques normies ! A commencer par les conflits d’intérêt de Marc Ferracci, témoin de mariage de Macron et ministre de l’Industrie. Sommes-nous sûrs qu’il n’existe pas aujourd’hui une grande mafia, qui commence du délégué CGT local qui veut éviter des licenciements dans son usine, jusqu’au sommet de l’Etat où sauver une usine se fait moyennant quelques arrangements ou quelques…
ENJEU SÉCURITÉ -‘Frères musulmans’ – rapport officiel et petit bout de la lorgnette
Xavier Raufer. Atlantico Des siècles durant, la France fut « La Grande Nation ». Comment ? Pourquoi ? Clause- witz l’explique aux généraux Scharnhorst et Gneisenau, patrons de l’armée prus- sienne. Admiratif (et jaloux) le stratège définit ainsi la France : « Nation très homogène, non divisée, bien située, bien délimitée, riche, guerrière et pleine d’esprit ». En français classique, « Pleine d’esprit » signifie vive, acérée, inventive – l’inverse de la caste diri- geante du macronisme terminal, lourdingue de rythme et d’expression ; frileuse face aux grands espaces, aux idées originales ; stérile en matière de diagnostics justes et de solutions effectives. Typique de cette besogneuse atonie, le récent rapport « Frères musulmans et islamisme politique en France » ; lourd démarrage historique ; escapades à l’étranger banales, voire idiotes, comme la Turquie « dernier bastion frériste au Moyen-Orient » ; or en Turquie, le frérisme, c’était l’invasive nébuleuse (dite FETÖ) de Fetullah Gülen, (mort aux États- Unis en octobre 2024), éradiquée de tout le service public, de toute l’armée d’Ankara, après le putsch raté de l’été…
À Riyad, Donald Trump redéfinit le Moyen-Orient
Jean-Baptiste Noé Le 13 mai dernier, en voyage dans le Golfe, Donald Trump a prononcé un discours essentiel à Riyad, qui redéfinit les relations entre les États-Unis et le monde arabe. C’est un discours de rupture par rapport aux politiques américaines conduites depuis les années 1990. Rupture face à l’idée de « nation building » portée par les néo-conservateurs et les universalistes, rupture face au discours du Caire (2009) de Barack Obama. Fin de l’universalisme À rebours de Bush et d’Obama, qui voulaient modifier le Moyen-Orient en y apportant la démocratie, y compris par les armes, en portant sur la région un regard moral, Trump défend l’idée que le développement est d’abord une question interne, et que les États-Unis n’ont pas à s’en mêler. « Cette grande transformation [du Moyen-Orient] n’est pas le fruit de l’interventionnisme occidental… qui vous donne des leçons sur la manière de vivre ou de gouverner vos propres affaires. Non, les merveilles étincelantes de Riyad et d’Abou Dhabi n’ont pas été créées par les…
Courons-nous à toute vitesse vers un Grand Effondrement ?
par Éric Verhaeghe 26 mai 2025 La situation de l’Occident, et singulièrement la situation de la France, sont extrêmement instables. Dans le cours de l’histoire, nous traversons un période de déclin qui devrait impacter durablement l’ordre international. Mais cela signifie-t-il que nous devons avoir peur d’un effondrement brutal qui nous entraînerait dans le chaos et dans la ruine ? Il nous paraissait important d’aborder rationnellement et calmement une question qui, nous le savons, obnubile certains de nos lecteurs. C’est l’objet de notre Chaos Global de la semaine. https://lecourrierdesstrateges.fr/2025/05/26/courons-nous-a-toute-vitesse-vers-un-grand-effondrement/ Beaucoup d’entre vous expriment une angoisse face à un risque de Grand Effondrement de l’Occident, et singulièrement de la société française. Cette angoisse est forte et conduit certains à des choix absurdes. Nous l’avons vu hier, avec Jeanne, manipulée par la peur pour donner de l’argent à des arnaqueurs qui lui promettaient un monde meilleur et, en tout cas, une amélioration de son sort. Redisons-le, la peur du Grand Effondrement ouvre un marché alléchant à tous ceux qui promettent de…
Rafales abattus ou… le chant du cygne
L’épisode des Rafales abattus à la frontière indo-pakistanaise n’est pas un simple fait militaire. Pour Jean-François Geneste, expert aéronautique et défense, il plonge dans des racines plus profondes. L’Éclaireur par Jean-François Geneste Quinze jours après l’opération Sindoor de l’armée indienne, visant des sites pakistanais en riposte à l’attaque qui avait fait 26 morts le 22 avril dans le Cachemire indien, on ignore toujours combien d’avions, et notamment de Rafales de fabrication française, ont été abattus par la défense pakistanaise. Un ? Trois ? Et pourquoi ? La question est cruciale. Pour l’Inde, qui, avec une flotte de 36 Rafales en service (chiffres avant le 7 mai), se prépare à en réceptionner 26 autres. Pour Dassault également, alors que l’Indonésie vient d’annoncer la suspension de l’achat de 42 avions de combat. Mais il serait réducteur de limiter cet épisode à un simple fait militaire, même s’il concerne le fleuron de la défense française. Pour Jean-François Geneste, le problème est plus profond. «C’est le résultat de politiques menées depuis des…